Pas un jour ne passe sans qu'on entende parler de fabrication additive, ou d'impression 3D. C'est bien simple : "Avec la fabrication additive, nous sommes à la veille d'un tsunami", s'enflamme Joël Berger, directeur général de Matéralia (pôle de compétitivité en Lorraine Champagne-Ardenne, spécialiste des matériaux structurants et procédés de mise en oeuvre). Et même un peu plus que cela : "Aujourd'hui, des pièces fabriquées grâce à la fabrication additive sont déjà en fonction sur des aéronefs, on n'est plus dans la science-fiction", s'enthousiasme Sébastien Guenet, délégué territorial Ardennes de l'Union des industries et métiers de la métallurgie (UIMM) Champagne-Ardenne. "Il faut faire en sorte que notre région soit à la pointe, dans un domaine qui demain sera essentiel", reprend Joël Berger. Aujourd'hui, la fabrication additive permet de réaliser des pièces de production, et vient, de ce fait, concurrencer ou renforcer les procédés traditionnels de fabrication, voire ouvrir des opportunités de diversification sur les marchés à forte valeur ajoutée. Loin de se limiter à quelques domaines de pointe, elle impacte aujourd'hui tous les secteurs, pour la conception de toutes sortes de pièces. Le seul hic ? Son coût, encore très élevé.
Un projet associant de multiples partenaires
C'est, en partie, pour cette raison qu'une plate-forme régionale de fabrication additive, dont le nom, Platinium 3D, a été dévoilé jeudi, va voir le jour à Charleville-Mézières, sur le site du moulin Le Blanc. Un projet porté par des partenaires multiples, comme l'UIMM, le Critt ou le pôle Matéralia, soutenu par une kyrielle d'acteurs institutionnels. "En quelques mois, nous avons su nous mettre autour de la table, pour créer cette plate-forme, se félicite le préfet des Ardennes, Frédéric Perissat. Nous avons un creuset, une dynamique en marche. C'est une opportunité, à nous d'en faire une réussite. La fabrication additive est une rupture technologique essentielle : soit on prend le train maintenant, soit c'est terminé." Face à cette nécessité, la création de la plate-forme a été menée tambour battant, jusqu'à ce mois de décembre, où tout semble calé. Les machines ne tarderont pas à arriver : une première courant janvier, les deux autres d'ici la fin mars. Des "imprimantes 3D" de taille industrielle, "d'un très bon niveau et qui répondent à des besoins identifiés", dixit Sébastien Guenet. Les moyens techniques de la plate-forme coûteront quelque 3 millions d'euros, auxquels il faudra ajouter un million supplémentaire pour les "moyens humains". Deux ingénieurs de recherche devraient ainsi être recrutés.
Tout ne s'arrête, cependant, pas aux machines : la plate-forme a vocation à être la pierre angulaire d'un écosystème visant à "positionner notre territoire comme un acteur majeur de l'industrie du futur", et donner un coup de main, aux entreprises locales, en entrant dans une logique de collaboration et de mutualisation, leur évitant ainsi une "rupture technologique" dommageable, à plus ou moins long terme. Une grande part de l'activité de Platinium 3D concernera ainsi la formation, "très importante si l'on veut devenir un territoire d'excellence", mais aussi la recherche et le développement.
Un "écosystème" complet
Pour compléter Platinium 3D, les initiateurs du projet misent beaucoup sur la création d'une filière d'ingénieur à Charleville, mais aussi sur la mise en place d'une chaire industrielle, pour laquelle des chercheurs de haut vol devraient être recrutés. La mission première de la chaire sera de travailler sur "les verrous technologiques", explique Jean-Paul Chopart, directeur du LISM (laboratoire d'ingénierie et science des matériaux) de l'université de Reims Champagne-Ardenne. Autre objectif de la chaire : "Participer au développement de projets en lien avec les entreprises."
Elle commencera à fonctionner en janvier, et a été validée pour trois ans, reconductibles une fois. "Cette chaire, c'est avant tout des hommes et des femmes", poursuit Jean-Paul Chopart, qui indique qu'un titulaire sera recruté prochainement, et sera rejoint par des doctorants, post-doctorants et stagiaires de niveau master. En tout, le fonctionnement de la chaire devrait coûter un million d'euros.
Ne dites plus plateforme de fabrication additive, mais Platinium 3D
Jusqu'à présent, la plate-forme régionale de fabrication additive restait pour le moins absconse. Le fait de donner un visuel et un nom, Platinium 3D, à l'ensemble, permettra de l'identifier bien plus aisément, et d'en faire une "marque" à part entière.
Plus d'info sur le site internet Internet dédié à la plateforme : www.platinium3D.com
Dossier réalisé par Julien Azémar, paru en pages 10 et 11 de l'Ardennais du 1er décembre 2015